Guilhem BOYER, dont la vie nous est relatée par Jehan de Nostredame :

« Guilhen Boyer fut natif de la noble et renommée cité de Nice, anciennement appelée Cap de Prohensa ainsi que le nous a laissé par escript le monge des Iscles d’Or, disant qu’il setoit savant aux sciences de Mathématiques : fut amoureux d’une dame de Nice de la mayson de Berre, à la louange de laquelle feist plusieurs châsons en angue Provensalle, laquelle adiousta une grande foy au jugement que fist ce poëte tant sur la physionomie, que sur la chyromance, esquelles sciences il estoit fort renommé et expérimenté. En sa jeunesse fut mis au service de Charles II du nom, et après la mort dudict Charles continua son service avec Robert son fils roy de Naples, Comte de Provence, lesquels après avoir expérimenté le savoir de ce poëte, le proveurent de l’office de Podestat en ladicte cité de Nice, les habitans de laquelle se tenoyent bien heureux de ce que Boyer s’y tenoit, pour l’excellente doctrine qui estoit de luy, et de ce qu’il s’aquitoit si bien en sa charge : et bien que cette provision fut contre la teneur des privilèges et libertés de la cité, ce néantmoins ilz l’acceptoient toutes les années de Podestat.

… Il n’estoit point encores parvenu à la cognoissance de la royne Iehanne qui regnoit de ce temps à Naples, parce qu’il estoit fort vieux et trépassa en l’an 1355. »

De son oeuvre, nous est parvenu le premier couplet d’une « canson » adressée à la princesse Marie de France, femme de Charles, duc de Calabre, et un « planh » anonyme lui étant attribué sur la mort de Robert, roi de Naples, comte de Provence en 1343.

1- Canson

Drech e razon es qu’ieu canti d’amor
Vezent qu’ieu ai ja consumat mon age
A li complaire e servir nuech e jor,
Sens’aver d’el profiech ny avantage ?
Encar el si fa cregner :
Dolent e non si fegne :
Mi pogne la corada,
De sa flecha daurada,
Embe son arc qu’a gran pena el pot tendre
Per so qu’el es un enfant jove e tendre.
(Droit et raison est-ce que je chante d’amour
Voyant que j’ai déjà consumé mon âge [ma vie]
A lui complaire et servir nuit et jour,
Sans avoir profité d’avantage ?
Encore il se fait craindre
Blessant, et ne se feint pas [il n’hésite pas]
Il me perce le sein (ou le coeur)
De sa flèche dorée,
Avec son arc, qu’à grand peine il peut tendre,
Parce qu’il est un enfant jeune et tendre.

Traduction de A.-L. SARDOU « l’idiome niçois, ses origines, son passé, son état présent » 1878 page 37

2- Planh (extrait : « cobla XXVI »)

Conplansa, vay senes tota bestensa
Per los pays. De levant al ponent.
Per Proensa passa premierament ;
Dedins Nissa tu t’en vay comensar
Tro la Verge Sancta Maria la mar.
Per Masselha passaras e per Arles.
Tre aqui s’estent lo poder del rey Carle..
(Complainte, vas sans délai
A travers le pays. Du levant au couchant.
Passe premièrement par la Provence ;
Par Nice tu commenceras
Jusqu’à la Vierge Sainte Marie de la mer.
Tu passeras par Marseille et par Arles.
Jusqu’ici s’étend le pouvoir du roi Charles.)

Enfin, nous ne saurions achever cette rapide présentation des troubadours niçois sans parler de Ludovic Lascaris, fils de Guillaume Pierre Lascaris, seigneur de Tende et de La Brigue, un des chevaliers de la reine Jeanne, pour son oeuvre « Pauriha », citée par André Compan (Le Comté de Nice. Ed. Seghers 1980 page 337), mort en 1379 ainsi que Béatrice Lascaris, de la même famille qui composa des « cansons ».

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