Amics occitans, la cronica Ribon-Ribanha d’ancuei en mentonasc, titrada « Ou Pass », v’es prepauada da JL Caserio, president de la Societat d’Art e d’Istòria dau Mentonasc (S.A.H.M) associacion afrairada a l’IEO-06. Asperam tanben lu vòstres escrichs per li cronicas futuri, que sigon racòntes dau passat ò dau quotidian, articles jornalistics, galejadas, poesias, cançons, scenetas de teatre, bandas dessenhadi…
a l’adreça : ribonribanha@yahoo.fr
« La garderem ribon-ribanha, nòsta rebèla lenga d’Òc ! »
Ou Pass
Da frountiéra dou Pouant San-Louì, a vista è meravilhousa susa Mentan, s’a coustiéra e tamben fint’à r’Esterel per belou temp. U caminahoù amiran aquestou camen scavà ent’ou mitan de roque que caran fint’à marina. Ancuhi es un lueg quiét ouna se pouhe imaginà a vita antiga ent’e grote de Grimaldi.
Mà issent u uelhe s’a cima que doumina ou camen-grann, se pensa ent’ou perìcoulou. Ou cantan, sempre belou, a una stòria terrìbila. Sema aquì n’ou Pass da mouart. Una dràia que cara pian-pianin, puhi a pèndita ven couma un gaveass dapé un bousquian de pi. Se countùnia encara à carà per un camen strenchet que mena n’un strangourament. Una vera chàpoura. Aquì noun se pouhe pu anà en ‘vant, ni en raire, y es un found-abish d’una centena de metre !
Un’ autra dràia despù a couala da Girauda permete de passà fachilament a frountiéra. Mà aquer camen ese ben survelhà du duganié. A gent de Grimaldi ou pilhavan, d’un temp, per anà à Mentan…. e tamben u countrabandié. Avanch a guerra, aquelou Pass era dejà counoushù da u refugié poulìtique. En temp de guerra, ou « mercà-negre » fasìa a bouan’ afaire per u countrabandié.
Mà ou renan tràgicou dou Pass data d’aquestou temp. Un mouran de gente san passà en per ailà : d’ome e meme de familhe entriégue que se scapavan dou sen païs e d’autre venent d’Africa per travalhà. U passahoù menavan aquela gentàia fint’a frountiéra, se fasìan pagà pran cà per abandounà-re, sourete, de nuech, davant ou gaveass sensa pouré anà o venì. Chèrtu, dam’un poc de chança se fasìan sentì per u duganié, mà u autre se ribatavan per utanta-cinq metre pu bass.
Ancuhi de barricade metàlique ben aute e un camen engerbà barran ou lueg. D’un’ autra part, r’autorouta a talhà ou caminet da Girauda. D’ailà, se pouhe gardeà aqueste rocasse maladete ! Mà nou’ se sente pu di couma tempe-fà : Ou Pass a torna fach un mouart ! (revirada JL Caserio)
Le Pas de la mort
Du poste frontière, au pont Saint-Louis, la vue est sublime sur Menton, sur la Côte (jusqu’à l’Estérel par beau temps). Les promeneurs admirent sur cette route frontalière creusée dans les rochers qui plongent jusqu’à la mer. Aujourd’hui un lieu tranquille où l’on peut imaginer la vie préhistorique dans ce qui reste des grottes de Grimaldi.
Mais en levant les yeux sur l’à-pic qui domine la route, on ressent une étrange impression de danger. C’est toujours très beau mais cet endroit a un passé terriblement meurtrier. C’est le tristement célèbre « Pas de la mort « . Un sentier en pente douce, puis une pente de plus en plus abrupte vers un bouquet de pins. On continue à descendre encore dans une pente rétrécie qui aboutit à un étranglement au bout duquel on se trouve piégé : impossible de revenir en arrière en remontant la pente et devant, c’est le vide en aplomb d’une centaine de mètres !
Un autre sentier depuis le col de la Giraude permet de franchir sans danger mortel les limites frontalières. Mais ce sentier se dirige vers l’intérieur et les lieux sont surveillés. Des anciens de Grimaldi l’empruntaient pour se rendre à Menton – les contrebandiers aussi, car qui dit frontières dit contrebande ! Ceux de la contrebande du sel (denrée très recherchée alors car très rare, mais régie d’Etat en Italie) ainsi que de marchandises difficiles à trouver dans l’un ou l’autre pays trafiquaient dans les deux sens. La contrebande sait parfaitement utiliser les besoins du marché.
Avant guerre, le passage frontalier était déjà connu des fugitifs politiques. Pendant la guerre, le marché noir faisait la bonne affaire des fraudeurs. Mais le renom tragique du « Pas de la mort » date de la période des « passeurs d’hommes ».
Des centaines de personnes sont passées par là : toujours des hommes (et même des familles entières) qui fuyaient la prison des régimes politiques, ou la misère puis, encore plus triste, les travailleurs immigrés d’Afrique du Nord et d’Afrique. Les « passeurs » mesuraient-ils leur triste responsabilité ? Après avoir aidé les clandestins à franchir les hauts barbelés de la frontière, les passeurs se faisaient payer (cher) et abandonnaient leurs « passagers ». Ceux-ci cheminaient dans la nuit, angoissés, car ils finissaient par se retrouver devant l’à-pic, sans pouvoir avancer ni reculer. Certains ont eu la chance de survivre, les cris ayant été entendus par des douaniers ou des policiers, les autres feront la chute, fatale à 85 mètres plus bas.
Aujourd’hui, de hautes barrières métalliques, et des broussailles touffues rendent ce sentier impraticable. L’autoroute coupe le sentier de la Giraude. Du tunnel de la Giraude, on ne peut que regarder les célèbres et funestes rochers. On n’entend plus dire comme il y a quelques années : « il y a eu encore une victime au Pas de la mort » !
Ginette OLIVESI-LORENZI